le sublime au XXe siècle, analyse de Newman

  • définition du sublime

en 1790, dans la « critique de la faculté de juger », Kant distingue deux catégories esthétiques, le beau et le sublime. La première relève de la mesure alors que la seconde relève d’une esthétique de la démesure.

Depuis les grecs, le beau est identifié avec la mesure, c’est-à-dire la bonne disposition des parties. Cette tradition est issue des pythagoriciens, pour qui le beau reposait sur une proportion simple et définie des parties par rapport au tout (« la beauté consiste dans la grandeur et la disposition ordonnée » dit Aristote dans « Poétique »). Cette idée nous a été transmise par Augustin au IVème siècle (« il n’y a pas de chose ordonnée qui ne soit belle » dit-il dans « de vera religione »), et sera reprise à la renaissance par Alberti qui écrit dans le « De re aedificatoria » en 1450 : »la beauté est un accord, ou une certaine conspiration (s’il faut parler ainsi, des parties en la totalité, ayant son nombre, sa finition, et sa place, selon que requiert la susdite correspondance, absolu certes et principal fondement de nature ».

chez les grecs, l’hubris (la démesure) est condamnée. Pour autant, elle fournit l’inspiration de certaines œuvres, comme l’œdipe de Sophocle qui se crève les yeux, l’Illiade d’Homère qui regorge de combats violents.

 

 

  • le sublime chez Courbet

la source de la loue-1864 national gallery

 

Comme Philip Shaw le développe lors de l’exposition « l’art du sublime« (lien pour avoir le texte en anglais) à la Tate de Londres en 2013, « la source de la Loue » est un cas limite au XIXème siècle : c’en est fini des espaces infinis des romantiques, la vue est coupée par la source de la Loue, l’obscurité est peu attrayante, inquiétante même.

« dans cette version de la « source de la Loue » de 1864, une rivière surgit de l’intérieur énorme et sombre d’une caverne  ; le sentiment d’excès est crée par le contraste avec une petite silhouette solitaire au premier plan. Avec ses contrastes entre la lumière et l’ombre, l’énorme et le minuscule, la peinture est un modèle du sublime romantique. même si, comme le note le critique James Elkins, le sujet de la « source de la Loue » diffère considérablement avec les « plaines infinies » et les larges panoramas du romantisme. La vue est bouchée, de façon paradoxale par la bouche de la caverne. l’infini palpitant laisse la place à une gouffre sombre très  peu attrayant. Elkins continue en citant le critique littéraire Neil Hertz qui insistait sur l’impasse du sublime romantique : sans issue, le spectateur  est face à une matière subjective, une matière inanimée  qui résiste à toute transcendance. Cette confrontation entre l’homme et les rochers reflète l’impossible affirmation de soi.

Courbet. origine du monde.1866

Courbet. origine du monde.1866

 

 

 

 

La modernité du réalisme de Courbet tient justement dans tient justement dans l’affirmation de cette impossibilité au sein du sublime romantique. Cette note tragique sera reprise dans « l’origine du monde ». Livrée en 1866 à Khalil Bey, un connaisseur en art érotique, la peinture représente le torse d’une femme perdue dans des linges éparpillés. La peinture naturaliste a pour sujet réel un vagin peint très soigneusement, la vulve légérement ouverte entourée de poils pubiens sombres et abondants. le centre caché de la sexualité, symbolisé par l’obscurité sombre de la grotte de « la source de la Loue » est rendue explicite. » (trad. h.A.)

 

  • le sublime aujourd’hui

Aujourd’hui, dans notre époque de doute, la peinture sublime est celle que met en scène les limites de la représentation.

Lyotard écrit « j’appellerai [post]moderne l’art qui se consacre à présenter qu’il y a de l’imprésentable. Faire voir qu’il y a quelque chose que l’on ne peut concevoir et que l’on de peut pas voie ni faire voir : voilà l’enjeu de la peinture [post]moderne. » (in « le post moderne expliqué aux enfants » p22)

Dans l’art du passé, on peut penser aux représentations de spectacles naturels romantiques (Vernet, Isabey…) auxquelles se réfère Burke (in « Recherche philosophique sur l’origine de nos idées du sublime et du beau » en 1757), ou aux peintures de Constable, Delacroix… On peut encore davantage penser aux peintures de Turner ou de Friedrich  qui en font le concept clef de tout leur art.

Le sublime est essentiel dans l’art actuel car il nous permet de comprendre qu’un impossible est à la base même de l’art. On peut en trouver la trace dans quelques projets artistiques

newman."onement".48

newman. »onement ».48

1. B. Newman

B. Newman revendique le sublime dans son texte « sublime is now » dont vous trouverez des extraits ci-joints. Newman pensait l’homme capable de se libérer de tout dogme. Il croyait aussi au pouvoir que des formes abstraites ont de transmettre des idées ou des sentiments, influencé en cela par l’art kwakiuti de la côté nord-ouest, Enfin, grace au concept juif de makon (lieu ou Dieu est), il cherche à créer le sentiment d’un lieu de mystère, un « sentiment de sa propre totalité, de sa propre singularité, de sa propre individualité et, simultanément, de sa relation aux autres, qui sont également séparés.»

sublime par newman (1)
sublime par newman (2)sublime par newman (3)

 

 

 

2. M. Snow

M. Snow avec son film « région centrale » qui montre un paysage sans intervention humaine, comme s’il s’agissait d’observation d’une sonde spatiale.

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