Martin Barré

Martin Barré
jusqu’au 4 janvier 2021
Considéré comme l’un des peintres abstraits les plus importants de la seconde moitié du 20e siècle, Martin Barré fait l’objet d’une rétrospective-événement au Centre Pompidou. Cette exposition fait suite à celles consacrées aux artistes abstraits Pierre Soulages, Simon Hantaï, Jesus Rafaël Soto, François Morellet ou, dernièrement, Ellsworth Kelly. L’excellent accrochage permet enfin de reconsidérer l’œuvre dans son ensemble.

Le monotype


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Les quelques lignes introductives de l’ouvrage (Martin Barré. Coédition centre Pompidou/ Mamco de Genève / Flammarion) résument parfaitement une première réception des œuvres de Martin Barré : « la radicalité des gestes – entendus au sens de formes, qui sont également des formes de pensée(…) ». Lionel Bovier, directeur du MAMCO, cherche ainsi à rattacher l’oeuvre de Martin Barré aux expositions organisées par son institution autour de l’art conceptuel : « son rapport à la construction du tableau par un système de règles n’est pas sans évoquer celles que se fixent un Sol Lewitt ou un François Morellet dans la seconde partie des années 60, n’était-ce la liberté avec laquelle Martin Barré se réserve de les modifier en fonction du résultat pictural ». Car en effet, Martin Barré reste peintre, malgré un bref épisode conceptuel de 1968 à 1971. Cet ouvrage donne enfin accès à une œuvre nouvelle et radicale, en la présentant dans son ensemble. Michel Gauthier, commissaire de l’exposition dont cet ouvrage est le catalogue, déploie de multiples analyses qui la rendre enfin accessible : dès ses premières expositions, il tranche avec des toiles ni lyriques, ni géométriques, et qui ne peuvent pas non être rangées sous la bannière du formalisme. Pour éviter toutes ces étiquettes, Marcel Gauthier se base d’abord sur une description précise des œuvres, à commencer par « 59-120×110-C », une de ses toiles les plus célèbres. Elle montre un losange sur la pointe, non peint, juste entouré de peinture blanche. Pour nous faire comprendre ce dont il s’agit, l’auteur les compare à Fontana, ou à Clifford Still, pour mieux le distinguer de ses contemporains. « Dans cette monochromie qui est déjà espace, mieux étendue, j’introduis imprudemment des formes. (…) Leur existence est périlleuse (…) car compte autant pour moi l’espace que leur intrusion provoque » : Marcel Gauthier fonde en effet son analyse sur un Martin Barré « embrayeur d’espace ». Plutôt qu’une forme ou une ligne, ses œuvres ouvrent des espaces, ceux internes à la toile mais aussi ceux qui restent hors champ, mais n’en font pas moins partie de l’œuvre. Dans cette œuvre, que faut-il voir en effet entre un losange ou l’espace extérieur dont la toile ne serait qu’un indice ?

Yve-Alain Bois est sans doute le principal critique de l’artiste et a déjà publié en 1993 une monographie aux éditions Flammarion. Il se concentre ici sur le travail de la touche : dans le contexte de l’épanouissement de l’école de Paris, Mathieu par exemple, Martin Barré se singularise par le rejet de leur « patte », censée témoigner de leur état d’âme. Lors de son exposition de 1960 où, après avoir abandonné la brosse du peintre pour le couteau, il l’abandonna à son tour pour se réduire à peindre directement au tube… toute la critique l’abandonne. Seul Restany le défend et remarque que le peintre « s’est débarrassé d’un seul coup de tout un attirail démodé, d’un vocabulaire de formes anachroniques qu’il s’était auparavant efforcé en vain de faire revivre ». Yve-Alain Bois analyse aussi l’accrochage de cette exposition qui empêchait encore un peu plus d’inventer une quelconque histoire. Les toiles qui d’ordinaire s’adressaient au spectateur en étant accrochées à hauteur de ses yeux, réinvestissaient l’espace entier du mur, depuis le sol jusqu’au plafond.

Le troisième texte « La peinture mise en quatre » de Jean-Pierre Criqui est lui aussi très éclairant. L’auteur se concentre sur les quatre « quadriptyques » réalisés en 1960 et 1962 qui tous proposent à la fois une dis- et une con-jonction. L’œuvre naît de la tension entre les deux modes de lecture que Martin Barré veut simultanés. Molly Warnock, Ann Hindry et Clément Dirié continuent cette analyse en se concentrant sur des épisodes ultérieurs de son œuvre, avant sa mort en 1993.

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