« Etre artiste c’est le meilleur moyen de communiquer avec les gens, sans parler. Une œuvre d’art est un bon outil de communication: elle peut interpeller et faire parler » (Kawamata)

élaborer une réflexion autour de la phrase de Kawamata suivante. Votre réflexion devra reposer sur des exemples précis, mais pas forcément tous de Kawamata.

« C’est quoi être artiste pour vous? »
Tadashi Kawamata: »
 Etre artiste c’est le meilleur moyen de communiquer avec les gens, sans parler. Une œuvre d’art est un bon outil de communication: elle peut interpeller et faire parler. »

 

Kawamata compare l’œuvre et le travail d’un artiste à de la communication. Sa proposition peut être divisée en deux temps : il dit d’abord que l’œuvre permet de communiquer sans parler, comme un langage sans mot, ce qui est le propre d’une définition romantique de l’art. Mais il réduit aussi l’art à un outil, fut-il de communication. On s’intéressera aux formes récentes de l’installation ou de la performance qui semblent vouloir concilier ces deux visions antagonistes de l’art et du rôle de l’artiste dans la société.

taxi pluvieux (Dali)

taxi pluvieux (Dali)

L’art des installations est véritablement apparu dans les années 60, mais il faut remonter sans doute aux expositions surréalistes des années 20-30 pour voir les premières tentatives de nous faire participer : l’œuvre n’est plus un objet extérieur imposé au spectateur. Il faut l’expérimenter . Breton raconte  en 1936: « Dans la cour de l’exposition, Dalí avait mis un mannequin et une petite douche dans un vieux taxi. Le premier jour, il pleuvait doucement sur ce mannequin qui représentait une dame allant à l’Opéra. Quinze jours après, la dame était couverte d’escargots ; tout était vaseux comme une muqueuse. Elle était devenue le portrait de Dorian Gray. »

 

 

 

 

A partir des années 60 et d’une plus grande démocratisation de l’art, il ne s’agit d’imposer à une foule de visiteurs une vision extatique d’un artiste qui serait tel un grand prêtre. On est à l’opposé de la vision décrite par Kandinsky dans « du spirituel dans l’art » qui voyait l’artiste génial au somment d’une pyramide qu’il guide vers un avenir qu’il lui dessine. Aurier définissait aussi l’artiste comme un prêtre dans les années symbolistes. De même, « under the water » réalisée par Kawamata à Paris en 2012 permet de dire ce qui fut vécu par les japonais lors du tsunami qui ravagea leur côte. A la fois la splendeur du ciel vu à travers les débris, et le chaos des formes flottantes.

Ces installations semblent véritablement communiquer sans parler. Pour les visiteurs des expositions surréalistes en 1936, l’inconscient et le rêve devenaient palpables, tout comme pour les visiteurs de « Under the water », la splendeur et l’horeur de la vision de ceux qui étaient sur le point de se noyer pendant le tsunami.

 

On peut regretter ce temps heureux où l’artiste délivrait un sens plus perceptible. A la même époque, on pouvait apprécier le cubisme de Picasso ou de Braque, la rigueur de leurs constructions et de leurs réflexions picturales, mais on pouvait tout aussi bien préférer les effusions colorées de Matisse qui voulait mettre au contraire les sensations avant ces réflexions conceptuelles. Désormais, l’art s’expérimente. La participation active du spectateur est n écessaire.Déjà les combine painting de Rauschenberg dans les années 60 sont autant des objets faisant appel au monde quotidien qu’à l’univers pictural.

charlène (rauschenberg. 1954

charlène (rauschenberg. 1954

 

 

 

 

Désormais, la lampe de « Charlène » clignote et le miroir renvoie notre image. On participe à l’œuvre autant qu’elle nous est imposée de l’extérieur. Les objets minimalistes ou les constructions plus conceptuelles des américains imposent cette expérimentation. Comme les constructions de Kawamata dans lequel le public participe – l’artiste ne travaille plus seul – les œuvres de Abramovic peuvent apparaître caractéristiques de notre époque. Le public intervient dans l’œuvre et sa conversation avec l’artiste participe lui-même au travail exposé.

 

L’œuvre peut cependant être à la fois un outil pour interpeller le spectateur et aussi une proposition plastique. « Present continuous past » de Dan Graham rend une perception du temps possible. Elle permet véritablement aux spectateurs d’entrer en relation les uns avec les autres dans cette perception même. Mais cette œuvre n’est pas simplement un outil de communication grace à l’expérience qu’elle nous impose.

melancolia. (Kiefer. 1989)

melancolia. (Kiefer. 1989)

 

 

 

De même, les peintures de Kiefer nous donnent une perception incomparable de ce que le travail de mémoire peut vouloir dire pour un allemand né juste avant la seconde guerre mondiale. L’omniprésence du plomb, symbole par excellence de sa mélancolie, atteste de la force de cet effort.

Toutes ces œuvres ne sont pas que des supports de communication. Comme autrefois chez Leonard de Vinci, l’œuvre peut être un outil de communication, mais aussi dépasser cette valeur d’outil par la multiplicité des significations qu’elle contient.

 

L’art est sans doute ce qui distingue l’humanité.  Sa force de communication est importante. Mais elle ne suffit peut-être pas. Si on veut qu’il conserve sa force d’interroger, il faut sans doute qu’il prenne une forme , même si celle si doit être invisible comme dans l’art conceptuel. Si l’on veut qu’il continue à nous interpeller, il faut peut-être continuer à donner à l’artiste véritable une place à part, loin d’une hyper démocratisation de la société actuelle.

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