peinture cubiste

Pour mieux connaître l’histoire du mouvement, je vous renvoie à mon texte d’histoire de l’art, où j’analyse les critiques de l’époque et les remet en perspective. c’est surtout la fin de ce cours qui me semble importante pour notre propos.
Par rapport à ce que nous avons fait dans la séance de dessin cubiste analytique, il s’agit d’enrichir encore la richesse de notre travail monochrome par ce que nous permet la peinture:
- ses tons plus ou moins chauds
- ses matières
- ses transparences.

Dès 1908, Braque introduit des dégradés dans chaque ton, comme ici dans la partition pour indiquer la courbure de la page sous la lumière. Ce traitement classique donne beaucoup de présence à cette feuille et le même traitement est repris dans la page de droite. Ce traitement reste classique. Ce n’est plus le cas dans le manche de la mandoline qui est éclairé en bas et dans l’ombre en haut. De même, la face avant de l’instrument est éclairée devant le ventre sombre de l’instrument. Mais Braque cherche déjà à relier le corps de l’instrument à la table sur laquelle il repose en réalisant certaines partie de la nape en vert clair et d’autres en vert mélangé à du noir.
   
Braque en 1909 remplace l’ocre par une alternance de terre de sienne brulée (chaude, presque orange) sur le manche du violon par exemple, avec des bruns plus froids sur la partition. Il utilise alors de la terre d’ombre naturelle mélangée à un peu de vert et de blanc. Le blanc a la fonction de rendre le ton moins vif et permet le passage au haut de la composition qui est davantage en lumière. La tenture à droite de la palette montre encore plus de vert pour reculer et créer un espace : le violon est devant la partition qui est devant la palette qui est devant la tenture.
Cet espace est très logique mais Braque s’en méfie. Il semble avoir cherché à détruire ce volume classique en ajoutant en bas à droite un enchevêtrement de plans, table ou meuble, de face ou de profil(?) qui nous force à recréer la scène au fur et à mesure de notre lecture.
L’alternance de chaud (violon), d’ocre (meuble), de terre d’ombre (palette) et de vert (tenture) crée un espace que Picasso et Braque interroge dans les mois qui suivent, au risque de voir disparaître les objets. Ils privilégient l’espace de la toile (en 2D) plutôt que le réel. Ces œuvres recherchent un nouveau langage plastique qui représente le réel, mais aussi la recherche que nous faisons sans cesse pour comprendre ce qui nous entoure. Braque disait ainsi que le spectateur devait parcourir le même chemin que celui accompli par le peintre qui part du réel pour arriver à la toile, mais en sens inverse.
 
  
Vers 1911-12, les toiles sont de plus en plus difficile à lire. « les usines du Rio Tinto à l’Estaque » ne sont plus compréhensibles que par la cheminée qui émerge en haut à gauche. Comme dans « le chef d’œuvre inconnu » où Balzac raconte en 1831 l’échec de Frenhofer à représenter le réel, Braque doit choisir entre le réel (la cheminée) ou la toile (l’enchevêtrement de plans). En dessous de la cheminée, on voit le mur de droite en pleine lumière et celui de gauche dans l’ombre. Cela semble être cohérent avec au autre pignon de maison plus loin à droite, lui aussi éclairé par la droite. Mais cela n’est pas conforme à ce qu’on voit sur la cheminée éclairée par la gauche. De même si l’on descend un peu. sous l’usine avec la cheminée, un toit terre de sienne brulée puis un mur clair avec à sa droite un mur gris sombre. L’éclairage est donc inversé? Sans cesse, braque intervertit notre vision. la droite devient la gauche, le volume un creux. Les plan s’incurvent. entre l’usine principale et le pignon de droite, un plan va du gris bleu au vert clair avant d’arriver au pignon éclairé. Des facettes ne cessent d’avancer et de reculer sous nos yeux. Ce mouvements s’accentuent encore si l’on prend en compte les couleurs chaudes et froides, dans un rythme de plus en plus rapide vers le centre de la toile.
Dans les coins, les contrastes sont atténués, et la matière plus légère, de façon à ce que notre regard reste centré sur les batiments principaux des usines.
 
Picasso et Braque tiennent à ce qu’ils représentent. Jamais, ils n’ont voulu atteindre la peinture « pure » dont parlait déjà Apollinaire dans ses critiques. Pas d’abstraction dans leur esprit. Les terres qu’ils utilisent sont bien des matières tactiles. Ils introduisent peu à peu des signes pour nous rappeler qu’il s’agit d’instruments. les ouies et les cordes du violon sont là pour nous dire ce que le volume de l’instrument ne dit plus. Le manche continue à se détache sur le fond, mais le fond semble revenir en avant sur les cordes, ou autour des ouïes. Le même jeu entre l’avant et l’arrière se retrouve à droite avec un éclairage plus fort où se mêlent le volume et le creux.
Sur la table ronde, dont on distingue les bord à droite et à gauche, une clarinette est posée à gauche du violon. Mais elle se perd dans la table. la diagonale descendante de cet instrument se prolonge au delà du bord de la table vers le tiroir sous la table, dont on voit, presque en trompe l’œil un bouton se détacher. Comme dans l’exemple ci-dessus, les ord sont plus légèrement traités, et la toile ovale est d’autant plus centrée que les coins ont disparu.

Je vous propose donc de réaliser une peinture d’après les croquis que vous avez réalisés en dessin de cubisme analytique d’après la nature morte suivante :

il faut jouer avec le clair-obscur, les tons plus ou moins chauds, et la matière, la touche plus ou moins lisse et transparente.

Le monotype

Elisabeth


La peinture d’Elisabeth réussit à nous montrer l’enchevêtrement des instruments et des autres objets grâce à une alternance de contours et de dégradés. Cela me paraît très réussi au centre de la peinture, autour des deux bouteilles. Mais la guitare à gauche reste trop isolée, et surtout, le fond j’est pas intégré au sujet principal, malgré les lettres en haut. Au point de vue des coloris, un peu de tons froids auraient été les bienvenus pour donner davantage de volume qui reste pour l’instant dit uniquement par le clair-obscur.
Le monotype

Colette Moses

Le monotype

Elena

Le monotype

Pascale 1


Le monotype

Pascale 2

Ces deux peintures rencontrent le problème posé par les couleurs que Picasso et Braque ont rapidement éliminées. En effet, les jaunes et les tons chauds ont tendance à sortir de la toile. Colette juxtapose trop les objets les uns à côté des autres : comme dans le dessin analytique, il faut ajouter des dégradés entre chaque plan (la guitare et la table par exemple, qui sont posés l’un sur l’autre ici). Elena fait davantage de gris qui permettent de relier les motifs, mais la force des couleurs est telle que les objets semblent entrer en lutte les uns avec les autres. Il faut prendre garde au jaune qui est la couleur la plus forte, selon J. Itten, professeur au Bauhaus. Le rouge et le bleu semblent faibles à ses côtés. Il faudrait atténuer les couleurs ou au moins les nuancer ou les rabattre (les mélanger avec leur complémentaire ou avec du blanc et du noir. Cf le cours sur les couleurs). Ce problème du jaune est tout à fait mesurable dans l’évolution de la peinture de Pascale qui a atténué son violet et modifié ses jaune dans sa seconde version. Dans ces deux versions, on mesure aussi l’importance de la composition : la barre ascendante noir ne peut être reliée au reste de la composition tant le contraste est fort avec le fond. Il faut sans cesse régler les contrastes de sa peinture comme un jeu de forces antagonistes (Malevitch pensait ainsi ses couleurs).
Le monotype

Eléonore

La composition d’Eléonore montre les mêmes qualités de défauts que son croquis préparatoire : la composition est trop séparée en deux parties indépendantes. Notre regard ne peut relier le haut et le bas, comme si la flute devait séparer la nature morte du haut de la guitare en bas. Et l’espace me paraît trop plat. Comme je tente de le décrire sur les peinture de Braque ci-dessus, le fractionnement des plans devrait nous conduire à des points de vue moins statiques.

Le monotype

Marie José

La très belle étude de valeur de Marie José de la semaine dernière aboutit à une composition centrée sur des contrastes forts de couleurs et de valeurs. Contrairement à ce que je disais plus haut sur le jaune, on remarque ici que la tache centrale fixe notre regard sur le trou de la guitare. Ce jaune vif est relié aux deux citrons qui fonctionnent comme des rappels. Le bruns chauds et les les verts enrichissent notre perception de l’espace, de même que l’alternance de tons vifs ou délayés. On pourrait regretter cependant que l’aquarelle ne permette pas de jouer aussi sur la matière, ce à quoi concourrent aussi les contours un peu forts de certaines formes.
Le monotype

Cathrine Goudet

Catherine joue avec les complémentaires et les l’ajout de plus ou moins de blanc pour rendre les tons plus ou moins vifs. Attention cependant à ce que les contours des objets ne se perdent pas trop dans le flou, et qu’on contraire, les partie les plus « dessinées » ne redeviennent pas trop logiques, comme en bas à droite dans les citrons et les bouteilles, ou dans le verre à gauche qui se détache de façon trop réaliste sur son ombre portée. Cela donne trop de relief à ces motifs.
 
 
 
 
 
 
 
 
Le monotype

Florence Monjal


Le monotype

Marianne Gentine

Comme pour certains dessins de la semaine, dernière, on voit que la peinture de Florence reste trop classique : il faut relire le cours d’histoire de l’art sur mon site, où J. Rivière explique bien (dès 1912) pourquoi cette perspective et cette lumière unique sont faux selon leur point de vue cubiste. Les quelques objets qui se superposent à d’autres ne suffisent pas à créer un lien entre eux, il faux absolument réaliser un dégrad » entre le citron de droite par exemple et le verre ou la guitare. De même ^pour la partition qui doit se lier avec le manche par une couleur intermédiaire. Ces passages sont indispensables, car sinon les objets sont isolés les uns des autres, ce à quoi conduisent les couleurs employées. Les cubistes les ont rejetées à cause de cela.
Marianne n’a pas ce problème des couleurs trop vives, mis à part le citron : le jaune est la couleur la plus « forte du cercle chromatique, selon JJ. Itten professeur de couleur au Bauhaus. Une très faible proportion de jaune suffit à nous le faire voir, ce qui n’est pas le cas des autres couleurs. Ici, par exemple, les tons rouges semble beaucoup moins rouge que les citrons. Cela concourt à détacher les citrons du reste de la peinture. Ce détachement est accentué par le fait que leurs contours sont totalement représentés. Il faudrait annuler leurs effets, un peu comme ce que vous faites dans les bouteilles et les verre qui se mêlent les uns aux autres. Cela crée un espace très dynamique… mis à part le citron central qui semble voler, et celui de gauche qui est posé devant la partition tout à fait normalement. à cet endroit, on croit être sorti de l’espace cubiste pour revenir à un traitement plus impressionniste, avec une perspective classique, ce qui détruit l’harmonie autonome du centre. Attention au fond qui n’est pas inséré dans le reste de la composition!
 
 
 
 
 
 
 
 
Le monotype

Elena

Au fur et à mesure que la semaine avance, je vois combien les peintures que vous m’envoyez tiennent compte des tentatives de chacun. Le premier envoi d’Elena manquait d’unité et de cohérence. Cela était principalement dû à l’excès de couleur, notamment du jaune. Cela n’est plus le cas ici. Bravo pour ce résultat, même si il me semble que tu n’as pas fait assez des passages dont je parlais sur lesquels je centrais notre travail. Dans ta peinture, il me semble que tu utilises davantage les peinture de Braque postérieures à la guerre. Il ne s’agit plus alors des recherches « analytiques » qu’il faisait avec Picasso vers 1908-12.
Le monotype

Braque « le buffet ». 1920. 81×100

Dans « le buffet » par exemple, Braque utilise le fond noir pour unifier sa composition qui reste centrée sur une nature morte cubiste. Mais il n’y a plus de passages entre les objets : Picasso et Braque ont inventé à partir de 1912 ce qu’on a appelé le cubisme synthétique, dans lequel les objets sont « synthétisés » en une forme unifiée, sorte de signe plastique qui signifie guitare ou poire ou raisin. C’est ce que tu me sembles faire ici.
 
 
 
Bravo pour ta peinture, même si elle passe par dessus l’analyse plastique qui seule, permet d’atteindre cette synthèse. En gros, ce que j’essaie de dire est qu’il faut faire ta première analyse avant d’arriver à ton résultat d’aujourd’hui. Sinon, on tombe dans une peintre trop vite décorative, comme certains peintres le feront par la suite.
Le monotype

André Marchand. nature morte. 1973

André marchand est l’un d’eux, qui réalise cette œuvre influencée par le cubisme… dans les années 1970. La peinture est belle, mais elle n’est plus motivée par une recherche philosophique ou existentielle comme c’était le cas chez Picasso et Braque dans les années de recherche cubiste. André Marchand est un excellent peintre dont les certaines œuvres sont conservées au musée de St Remy de Provence, mais il se contente d’appliquer une recette (ce qui est déjà pas si mal d’ailleurs).
 
 
 Picasso a dit qu’après avoir accompagné Braque sur le quai de la gare qui le menait vers le front en 1914, il n’a jamais revu son ami. En effet, il n’a plus jamais revu le complice de leur invention du cubisme. Braque a été célébré comme LE peintre français, et des obsèques nationales ont été organisées par Malraux à sa disparition en 1963. Mais était-il encore le chercheur complice de Picasso dans l’invention de l’art moderne?

Le monotype

Gilles d’Eggis 1

Le monotype

Gilles d’Eggis 2

Comme pour Elena, les deux belles compositions de Gilles me semblent davantage relever du cubisme synthétique que du cubisme analytique. En effet, la décomposition des objets me semble trop vite s’arrêter. en haut à gauche de la première peinture par exemple, on voit la guitare se décomposer peu à peu dans le fond, mais dans ce cas, il faudrait réussir à revenir vers l’avant, par exemple en passant par le manche à gauche vers le blanc puis vers la partition. Et ce manche nous en empêche justement. Ces clôtures bloquent un peu trop notre regard. En bas à droite, cela semble davantage le cas avec la partition qui semble continuer derrière le verre. Mais pourquoi alors l’avoir peint en bleu (ce qui l’isole)? de même pour les citrons. Ce sont ces trop fortes ruptures qui rapprochent cette peinture du synthétisme. Le cubisme synthétique transforme les recherches sur la perspective et la lumière, donc le traitement de l’espace, en une structure linguistique, comme je l’explique dans mon cours sur le cubisme.

Le monotype

Danielle resche 1

Le monotype

Danielle resche 2

Danielle réussit un beau travail qui tient compte de tout ce que nous avons dit cette semaine : les objets sont décomposés : chacun est décrit sans que tout soit dit . Cela les empêche de « sortir » du plan du tableau. Danielle dit la bouteille mais s’arrête en haut à droite selon une oblique rectiligne. de même pour le verre ou la guitare. Les passages entre ces objets sont bien étudiés. Tout au plus peut-on regretter que les lignes principales de la composition ne permettent pas de réunir davantage les éléments entre eux, comme la guitare et les verres, citron et bouteilles. Cela marche mieux dans la partition qui rappelle les verticales-horizontales de la table. Ces rappels auraient permies de réaliser davantage une composition à la fois unie et variée.

Le monotype

Marie Jose

La composition de Marie Jose réussit à prévoir ces passages entre l’avant et le l’arrière qui nous font entrer dans la profondeur de la nature morte (par exemple vers la guitare ou en bas à droite. Elle réussit aussi à intégrer la couleur. Pour ce faire, Marie josé a construit sa nature morte verre citron autour des complémentaires jaune-violet, en « rabaissant » la force du violet par une adjonction de blanc (cela fait donc du mauve pour le fruit rond à droite derrière le citron. de même pour le haut du verre ou à gauche). Cela lui permet de jouer davantage sur des contrastes de clair-obscur au dessus de la table et de reste dans des teintes de même clarté sur le plan de la table. Cela me semble très bien utiliser ce que nous avons vu sur la nature morte « violon et palette » de Braque.

Le monotype

Katia

Le monotype

Jean-Luc

Le monotype

Pascale

La partir centrale du pastel de Pasale est assez cubiste, avec les facettes des objets qui s’interpénètrent, mais ce motif se détache trop du fond pour que garantir l’homogénéité de la toile qu’ils recherchent. Picasso et Braque privilégient la toile dans son ensemble, et non pas le motif, qui devient souvent un prétexte pour leur recherche d’espace. Cet effet est encore renforcé par la couleur qui tranche avec celle du motif. Ce sont presque des complémentaires (bleu orange). De même, la composition de Jean-Luc est à reprendre : la peinture est en effet trop partagée en trois images distinctes : la nature morte influencée par Bonnard ou d’autres post impressionnistes, en bas à droite, s’accorde mal avec la guitare massive et frontale. il faut créer des passages et donc des facettes pour passer de l’un à l’autre, plutôt que le manche qui les sépare ici. La partie en haut à droite est davantage cubiste, mais devrait être reliée au reste.

Le monotype

Fautrier « nature morte aux poissons » coll part.

La peinture de Katia est très vivante et dynamique, ce qui s’accorde tout à fait avec la volonté des cubistes, même si au premier abord, le style n’en semble pas très cubiste. Cela est dû sans doute au style trop relâché : les contours sont trop souvent imprécis et très pâteux. Dans la partie centrale, on se perd entre les objets, bouteille, guitare, table… ? mais cela concourt à une grande expressivité. Cela te rapproche sans doute davantage de l’expressionnisme de la seconde école de Paris, ou du début de Fautrier(1898-1964), vers 1930. Fautrier est alors un des pionniers de ce qu’on appelle la technique des hautes pâtes, qui le mènera jusqu’à son exposition de 1945 à la galerie Drouin, dont le catalogue préfacé par Malraux le rendra célèbre. Quelques années plus tard, il sera le principal artiste du mouvement informel, mais ce sera alors une autre histoire.

Le monotype

Simone Mazer2

Le monotype

Simone Mazer1

Ces deux belles compositions de Simone montrent bien combien la monochromie peut devenir intéressante. Seuls quelques gris attirent nos regards sur différents objets, mais à leurs côtés, nos regards glissent facilement d’un objet à un autre. Tu semblais regretter ce flottement dans ton commentaire, lors de cet envoi. Je pense qu’il peut devenir un choix. Il faut l’assumer et trouver ce qu’il signifie. les compositions de Fautrier par exemple ont souvent ce côté monochromatique qui permet de tempérer la violence qu’il met parfais dans sa touche, comme on le voit ci-dessus dans sa nature morte. J’aime ton flottement ici, mais ne comprend pas pourquoi tu ne l’encourage pas en couvrant toute la surface, comme dans un all over. Il faudrait que notre regard soit vraiment perdu dans ces objets, comme dans la peinture « painting » de de Kooning que je mettais dans mon cours sur le dessin analytique. Cela est valable aussi pour ta deuxième peinture, dans laquelle les objets semblent encore plus s’effacer (mais le jaune n’y est-il pas trop fort?).

Le monotype

Fautrier « boites de conserve »

Le monotype

de Kooning « excavation » 1950

On voit ici le contraste chez Fautrier entre ses hautes pâtes et la douceur de ses tons. Dans le cas de de Kooning, « Excavation » est l’aboutissement du travail mené dans « painting » dont je parlais plus haut. Cette peinture a été adulée en 1950, tant elle représentais la perte de tout repère vécue par les américains dans cet après guerre, juste au moment de l’apparition du Mac Carthysme. C’est à cette époque que Pollock et de Kooning développe le all over caractéristique de l’expressionnisme abstrait.

L’ensemble envoyé par Catherine Berne est intéressant par sa cohérence. Dès le premier dessin, elle choisit de tempérer la rigueur du cubisme, ses facettes acérées par des dégradés au fusain. Le mélange de crayon, feutre fin et fusain permet de ne pas perdre trop d’information et de ne pas tomber dans trop de mollesse. Dès cette étape, elle choisit une composuition verticale en répétant plusieurs guitares, ce qui crée un rythme très musical : comme nous avons pu le voir avant le confinement à l’exposition « les musiques de Picasso, les peintres ont souvent affirmé que leur art est aussi temporel. La répétition d’un même motif permet de créer des rythmes. Ici, la guitare du haut est plus grande que les autres. Elles semble à part, comme si la lecture commençait par elle. Souvent on commence la lecture en haut à gauche, comme pour la lecture d’un texte. Ce point est important, et a été souligné dans un livre mémorable, « PEINTURE ET TEMPS » de Lamblin Bernard, paru en 1983 aux édition Klincksieck. Ce motif premier chez Catherine, est repris et répété un peu plus bas puis tout en bas, après rotation.
Ces répétitions et inversions ou décalages ont été souvent utilisées par Paul Klee, qui par ailleurs était un excellent violoniste (à l’orchestre de Berne dès 11ans!). Ici, chaque forme se répète comme si le motif musical devait être repris à intervalle régulier, ce qui est justement le cas dans la fugue. Chaque motif se décline vers la clarté à droite, mais certains restent plus sombres que les autres, comme si le motif devait rester dans le fond sonore qui ici est le noir, qui d’ailleurs a été rappelé par Klee dans son encadrement par deux bandes noires de largeur inégale. Dans cette aquarelle, tout résonne de l’harmonie à laquelle Klee aspirait.
Dans son aquarelle, Catherine Berne améliore encore le rythme en déplaçant certains éléments, fait un second essai qui me semble moins réussi, car les motifs sont moins choisis pour créer ce rythme, somme si elle avait voulu retrouver la vérité de sa vision. Dans la peinture non plus, Catherine n’a pas conservé cette répétition de la guitare qui créait ce rythme. Mais ses couleurs remplacent ce que la recherche de composition créait, en terme d’harmonie. Il s’agit de tons rompus : chaque teinte a été « rabattue) par le mélange d’un peu de complémentaire, et souvent un peu de blanc. Les tons sont donc atténué face aux jaunes et rouge vifs. Cela crée un espace tout à fait particulier. Catherine se demandait s’il faillait ou non ajouter du noir en bas à gauche. Il me semble en effet qu’il y a trop de blanc en bas, à gauche et à droite (mais peut-être le dessin s’arrête-t-il avant?). Si c’est le cas, le noir en bas à gauche créerait un e bas plus stable. Cela peut-être une solution, mais je ne suis pas sûr que cela soit souhaitable. Ce noir donnerait de la stabilité et achèverait le tableau. Mais le faut-il? Picasso dit justement, qu’il ne faut jamais « achever » un tableau, en jouant sur les deux sens du mot. Ce perpétuel inachèvement est en effet une solution attrayante… même si le blanc reste un peu gênant?

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