collage max Ernst

Lorsque Max Ernst découvre le travail de Giorgio de Chirico dans la revue Valori Plastici, c’est une révélation.

Sa réaction est la même que celle dont témoignent Breton ou Tanguy à Paris au début des années 20. Giorgio de Chirico est installé à Paris à partir de 1911, et y restera jusqu’à la guerre et son incorporation dans l’armée italienne. Il commence à exposer ses nouvelles oeuvres, influencées par les peintres qu’ils avaient découverts lors de son séjour au Beaux-Arts Munich en 1909-10, mais aussi par ses voyages en italie, ou la peinture moderne fauve ou cubiste qu’il découvre enfin à Paris. Dès le salon d’automne 1912, Apollinaire remarque la nouveauté de son travail.
« L’art de ce jeune peintre est un art intérieur cérébral qui n’a point de rapport avec celui des peintres qui se sont révélés ces dernières années. Il ne procède ni de Matisse ni de Picasso, il ne vient pas des impressionnistes. Cette originalité est assez nouvelle pour qu’elle mérite d’être signalée. Les sensations très aiguës et très modernes de M. De Chirico prennent d’ordinaire une forme d’architecture. Ce sont des gares ornées d’une horloge, des tours, des statues, de grandes places, désertes ; à l’horizon passent des trains de chemin de fer. Voici quelques titres simplifiés pour ces peintures étrangement métaphysiques : L’Énigme de l’oracle, La Tristesse du départ, L’Énigme de l’heure, La Solitude et le sifflement de la locomotive. »

Il ne s’agit plus de représenter le réel, ni même de mettre au point de nouvelles techniques, fauves ou cubistes, pour mieux le suggérer. Giorgio de Chirico perturbe notre sensation de l’espace et juxtapose des objets qui n’ont rien à voir entre eux pour témoigner d’autre chose que le réel. Le peintre raconte la vision qui fut à l’origine des ces peintures énigmatiques, qu’il perçut soudainement sur la place Santa Croce à Florence.
« J’eus alors l’impression étrange que je voyais toutes ces choses pour la première fois. Et la composition de mon tableau me vint à l’esprit; et à chaque fois que je revois cette peinture je revis ce moment : le moment pourtant est une énigme pour moi, car il est inexplicable. J’aime appeler ainsi l’oeuvre qui en résulte une énigme »
 
 

Lorsque Max Ernst découvre son travail, il a déjà travaillé et exposé avec les expressionnistes du cavalier bleu, puis a développé une oeuvre dada à Cologne. Ses premiers collages sont réalisés juste après la guerre, pendant laquelle il était officier. il disait l’incohérence du monde dans laquelle il fut plongé pendant le conflit. Mais déjà, par rapport à ce qu’on avait pu voir comme collage Dada à Zurich, Ernst affirme autre chose. le collage a un titre qui raconte une histoire et surtout les formes sont dans un espace. On est loin des collages dada réalisés à Zurich.
 
 
 
 
 
 

Arp parle de « poèmes sans mots », sortes de constellations biomorphiques aux configurations diverses. Ses papiers déchirés et jeté en l’air flottent dans un espace fluide. Les papiers noirs aux formes organiques, aux contours presque métamorphiques, tels ceux de bactéries vivantes, tissent entre eux des relations secrètes. « Le papier déchiré est beau comme la nature », On est alors frappé par la poésie que le peintre oppose à la barbarie. Mais on sait que les formes sont loin du hasard affiché. Les dessins gravés par Kandinsky quelques années auparavant pour Klänge sont très proches et l’on sait que des conférences ont eu lieu au cabaret Voltaire dès les premiers soirées.


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Dans ce collage réalisé à quatre mains par Arp et Max Ernst, plus encore que dans « La grande roue orthochromatique », les deux artistes on crée un espace unique et cohérent où une histoire autre que réelle peut se développer. Les corps sont nouveaux, mais la cohérence de l’espace les rend crédibles.

Je vous propose dans cet esprit d’utiliser la peinture pour rendre crédible un ou des collages, à partir des photographies que je vous ai envoyées, ou d’autres que vous auriez à votre disposition, en noir et blanc.
Il faut donc d’abord faire un collage avec les photos reproduites ici puis, en utilisant les mêmes valeurs que sur le document, peindre un fond ou les parties manquantes à la gouache pour rendre votre dessin crédible. Cet exercice nous permettra de nous familiariser avec les aplats et dégradé de gouache.
La gouache ne doit être ni trop sèche et épaisse, ni trop liquide ce qui la rendrait transparente. Attention, la gouache ne s’utilise souvent qu’en une seule couche, sinon, elle risque de se fendiller.
Pour créer un dégradé, il faut ajouter peu à peu de la seconde couleur, ici blanc ou noir.



 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
voici quelques dessins collages qui m’ont été envoyés. Ces deux collages de Marie Jose me permettent de préciser un peu encore ce que je vous proposais de faire.
Le premier collage montre une vraie invention à partir des images proposées. C’est un des buts de ces cours. Les images sont comme des stimulants pour notre imagination. Il faut réussir à les manipuler et leur faire dire ce que nous rêvons en les regardant. Cela nous renvoie aux conseils de Léonard de Vinci :
Je ne manquerai pas de mettre, parmi ces préceptes, une invention qui, bien que petite et ridicule est utile pour exciter l’imagination. Regarde sur un mur barbouillé de taches ou de pierres mélangées, tu y verras des paysages, des montagnes, des fleuves, des batailles, des groupes ; tu y découvriras d’étranges airs de paysages que tu pourras ramener à une bonne forme.
Il en est de ce mur comme du son de la cloche où tu entendras ton nom ou un vocable que tu imagineras.

Ce second collage devrait quant à lui rendre le collage totalement invisible, ce qui n’est pas le cas ici. Marie Jose semble avoir au contraire privilégié l’expressivité. Techniquement, cela nous imposerait de réussir à faire une gouache lisse et dégradée, comme sur les documents photographiques.
Voici deux exemples de Max Ernst qui utilise la force d’indice de photographie (une photo est « indice » de la réalité. La réalité est d’emblée donnée par la photographie, sans rien faire), mais réussit à la rendre imperceptible.


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Comme je le disais ci-dessus, Nous poursuivons pour l’instant deux buts : par l’utilisation du collage, forcer notre imaginaire à dépasser le réel. Comme le dit Lautréamont, la juxtaposition du Tigre et de la jeune femme de Mariane nous rappelle ce qu’il préconise pour atteindre une nouvelle beauté : « beau comme la rencontre fortuite sur une table de dissection, d’un parapluie et d’une machine à coudre ». Dans ce collage, les deux motifs se téléscopent et créent une étincelle (c’est le mot qu’utilise Breton pour parler des collages de Max Ernst) qui nous émeut.


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

La qualité réaliste de la photographie nous permet de croire instantanément aux images utilisés. Néanmoins, dans les deux dessins-collages de Catherine (1) et d’Elisabeth, la peinture ne permet pas à l’oeil de passer de la photographie réaliste jusqu’au reste du dessin. Il faut réussir à fondre la photographie dans le reste de l’image.

Ce travail technique est particulièrement réussi dans le second dessin de Catherine. Le personnage de gauche se transforme littéralement en route pavée, même si sa verticalité s’oppose sans doute trop à l’horizontalité de la route. Le personnage en haut à droite se fond vraiment dans ce qui l’entoure. Sans doute les zones blanches sur la joue droite et entre les parties d’ombre du personnage qui court coupent trop notre lecture. Souvent dans le surréalisme, les objets se transforment peu à peu. La joue peut devenir horizontale et pavée(?)

De même, dans le collage de Marie Jose qui disparaît dans les nuances de gris.

Pour la première séance, je vous propose de travailler à partir de têtes humaines et animales pour les entremêler dans cet esprit :

Le monotype

La peinture doit être rendue assez liquide pour que les ruptures entres les documents puisse disparaître sous les ajouts de peinture de même valeur. Attention à composer votre peinture et à ne pas trop concentre les parties collage ou les parties peintes. Elles doivents s’enchevêtrer pour disparaître.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Pour la seconde séance, je vous propose de créer un paysage humainisé
Le monotype

Le monotype


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
pour cette troisième séance, je vous propose de faire le lien entre les documents avec des feutres fins noir et blanc, de façon à pouvoir gommer les ruptures entre les documents issus de livres illustrés de gravures sur bois, courantes vers 1900, et largement utilisés par Max Ernst pour créer ses deux ouvrages mythiques que sont « la femme 100 tête » et « une semaine de bonté ». Max Ernst crée des visions qui racontent des histoires que le lecteur doit recréer à sa guise, comme dans un roman photographique ou un ouvrage illustré.
Le monotype

Ernst n’ajoute rien à ses collages ou quasiment, de façon à ce que les images paraissent crées par un simple enregistrement du réel. ce sont des quasi-photographies de notre monde intérieur.


Pour notre part, nous utiliserons les feutres pour ajouter des éléments de notre main.

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