Voir en peinture. jusqu’au 17 septembre à st Rémy de Provence

“Voir en peinture,
la jeune figuration en France”
jusqu’au 17 septembre au musée
Estrine à Saint-Rémy-de-Provence.

Cette exposition est admirable et présente l’état de la peinture contemporaine française. La qualité du choix des artistes et des œuvres présentées donnent une grande force au retour de la peinture dont il témoigne.
(Le musée fait face à la galerie Point Rouge qui présente mon travail d’artiste en permanence, en particulier cet été dans une exposition de groupe, ou à partir du mois de septembre sur le thème de la nature morte ». Je vous recommande tout particulièrement sa visite).

Dans le catalogue de l’exposition voir en peinture, Ann Dary souligne la continuité du travail présentée dans les trois musées à l’origine du projet

  • le musée des Sables d’Olonne,
  • le musée de Dole
  • le Musée Estrine à St Remy-de-Provence

Tous les trois possèdent des collections de peinture figurative qui permettent ainsi de mettre la jeune figuration française, réunie par les commissaires de l’exposition, en résonnance avec des œuvres historiques.

« Si la pratique des la peinture avait déserté de nombreuses écoles des beaux-arts, on peut constater depuis dix ans qu’une nouvelle génération est apparue sur la scène artistique ». Dans le catalogue très utile pour comprendre de quoi il retourne, on lira avec soin le texte de D. Semin. Il rend compte avec précision des raisons qui nous ont mené à la situation actuelle. Dès l’ouverture de son texte, Didier Semin, longtemps professeur d’histoire de l’art aux Beaux-arts de Paris pose la bonne question : » y aurait-il en peinture, une « exception française »? » qui expliquerait le rejet dont elle semble l’objet depuis tant d’années ? Pour expliquer ce rejet, Didier Semin remonte aux premières années du XXème siècle, lorsque Derain, Vlaminck, Picasso inventent l’art moderne. Dès cette époque, les artistes affichent un rapport particulier au réel. Ce qu’on a appelé « retour à l’ordre » ou le surréalisme n’ont fait qu’accentuer ce rapport difficile à la réalité dans la peinture française.
« l’art du XXe siècle pouvait-il encore s’attacher à la représentation du réel, ou sa mission historique était-elle de s’en émanciper? » Didier Semin repose les questions qui dès cette époque ont été, selon lui, mal posée? Cela a souvent été lié à des questions politiques, comme lorsqu’on regardait Hélion comme un traitre parce qu’il avait abandonné l’abstraction de ses débuts, ou Derain comme un collaborateur à cause de son voyage en Allemagne en 1941.
La fin de son article est passionnante car elle permet de bien comprendre des débats qui restent actuels, dont le livre de Benjamin Olivennes publié en 1921 « l’autre art contemporain » n’est qu’une des dernières manifestations. Selon lui, ce débat a « largement perdu de sa virulence, pour une raison précise, que l’exposition voir en peinture devrait mettre en évidence : en France, une jeune génération d’artistes (…) a décidé dans les années 2000 de ne pas tomber dans le piège et de peindre, au lieu de rédiger un millionième manifeste, « ce qu’elle vivait comme elle le vivait », en évitant de se laisser assigner un camp. »
Lorsque Didier Semin parle de virulence, sans doute pense-t-il essentiellement à la virulence des débats des années 90 dont je fus le témoin et dont j’ai alors parlé dans cette rubrique. La critique d’art s’était alors partagée en deux camps, les pour et les contre l’art contemporain. Catherine Millet Georges Didi-Huberman, ou Philippe Dagen et quelques autres défendaient ce que Marc Fumaroli, Jean Baudrillard ou Hector Obalk, et Yves Cena, et Jean Clair rejetaient dans un art contemporain qu’il jugeaient « ennuyeux » ou « nul ». Ayant travaillé avec certains d’entre eux, dans les deux camps, je mesurais ce qui les opposait, et la force de leur conviction.
Pilippe Dagen écrit à propos de ce retour à la figuration dont on est aujourd’hui le témoin, dans les colonnes du journal le Monde (23-24 avril)ean CLaraq , il n’y a aucune intention de créer ni une école ni un groupe : la peinture est leur seul lien et les styles sont très éclectiques. « il y en a pour tous les goûts et tous les genres se côtoient (…) On se réjouirait de tant de maitrise et de culture, si ces qualités n’étaient pas souvent l’essentiel, si non la totalité, de ce qu’il y a à voir » Philippe Dagen pointe du doigt la limite de ce retour. Pour qu’il ne soit pas qu’une lutte vaine d’arrière-garde réac, il faut que la technique ne devienne pas l’essentiel de ce que ces expositions présentent : « le regard ne se fixe que quand peindre n’est plus une fin ». Et le critique de défendre quelques peintres de l’exposition comme Nazairn Pouyandeh ou Stephane Pencreac’h ou l’excellent Simon Pasieka, qui sont au cœur de ces expositions.

OnementI de Newmann en 1948

« Arcadia Club », Huile de Jean Claraq


Didier Semin explique dans ce texte que ce qui sauve cette nouvelle génération de peintre est donc leur regard sur les peintres anciens, de Dürer à Philippe Cognée, ou Nina Childress (qui furent parfois leur professeur), et de ne pas se détourner « de cette intuition que la condition humaine est de « penser avec ses mains ». Je ne suis pas sûr que la raison soit suffisante à opposer à ce que craignait Philippe Dagen, sur une prétendue vacuité de leur peinture.

Mais la fin du texte est éloquente, dans laquelle Didier Semin parle des toiles de Marion Bataillard ou de Jean Claraq qui illustrent cet article (celle de Marion Bataillard est présente dans l’exposition). Il y voit un sorte de « réconciliation entre anciens et modernes. Ces deux peintres citent les peintres anciens, mais ne cessent pour autant de chercher du sens à ce qu’ils peignent, comme on peut le voir dans « Arcadia CLub » de Jean Claraq, qui cite Dürer pour représenter un club actuel, mais y poser des questions sur notre monde présent.

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