pastels de Odilon Redon

Odilon Redon est un des peintres choisis par Des Esseintes dans « A rebours » de Huysmans : il y incarne le mystère de visions étranges et pénétrantes dont des Esseintes cherche à s’entourer dans son où il se refugoe loin du monde.


Né en 1840, Redon entre en 1864 dans l’atelier de Gérôme aux Beaux-arts de Paris, mais n’adhérera jamais à son enseignement.
Dès 1865, il préfère suivre les conseils de Rodolphe Bresdin (1822-1885) qui l’initie à l’estampe, et en particulier à l’art de Dürer et Rembrandt.
Son premier recueil de lithographies Dans le rêve date de 1879. L’art de Redon précède le symbolisme dont il sera un des artistes les plus représentatifs.
Il lit Edgar Poe, Flaubert ou Baudelaire mais est proche aussi du botaniste Armand Clavaud (1828-1890) qui lui fait découvrir l’infiniment petit. Sans cesse, son observation du réel s’enrichit de l’imaginaire.

Dans ses « confidences d’artiste en 1894, il écrit :  » tout mon art est limité aux seules ressources du clair-obscur et il doit aussi beaucoup aux effets de la ligne abstraite, cet agent de source profonde, agissant directement sur l’esprit. L’art suggestif ne peut rien fournir sans recourir uniquement au jeu mystérieux des ombres et du rythme des lignes mentalement conçues. »
En effet, Huysmans dans « l’Art moderne » reconnaissait en 1881l’apport visionnaire de l’artiste.
« M. Odilon Redon, dont j’ai déjà dit quelques mots, l’année dernière, exposait toute une série de lithographies et de dessins. Il y avait là des planches agitées, des visions hallucinées inconcevables, des batailles d’ossements, des figures étranges, des faces en poires tapées et en cônes, des têtes avec des crânes sans cervelets, des mentons fuyants, des fronts bas, se joignant directement au nez, puis des yeux immenses, des yeux fous, jaillissant de visages humains, déformés, comme dans des verres de bouteille, par le cauchemar. Toute une série de planches intitulées le rêve prenait, au milieu de cette fantaisie macabre, une intensité troublante, une, entre autres, représentant une sorte de clown, à l’occiput en pain de sucre, une sorte d’Anglais félin, une sorte de Méphisto simiesque, tortillé, assis, près d’une gigantesque figure de femme qui le fixe, le magnétise presque, de ses grands yeux d’un noir profond, sans qu’un mot semble s’échanger entre ces deux énigmatiques personnages. Puis des fusains partaient plus avant encore dans l’effroi des rêves tourmentés par la congestion ; ici c’étaient des vibrions et des volvoces, les animalcules du vinaigre qui grouillaient dans de la glucose teintée de suie ; là, un cube où palpitait une paupière morne ; là encore, un site désert, aride, désolé, pareil aux paysages des cartes sélénographiques, au milieu duquel une tige se dressait supportant comme une hostie, comme une fleur ronde, une face exsangue, aux traits pensifs. »

A partir des années 90, il introduit cependant la couleur, et va peu à peu exclure le noir .
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Marius-Ary Leblond, dans son article « Odilon Redon. Le merveilleux dans la peinture » (La Revue Illustrée, 20 février 1907, n°5) :
« Il peignit la fleur : il la découvrit.
Etonné du coloris de la fleur jusqu’à l’inquiétude, étonné jusqu’à la plus naïve adoration de sa forme, il en reçut bientôt la révélation que rien n’est plus mystérieux que la simple nature, et dès lors il s’absorba en sa clarté comme il s’était enfoncé au labyrinthe de son imagination. Il peignit les fleurs mêmes que nous connaissons et telles que nous les voyons : des géraniums entre des feuilles feutrées, des marguerites, de tremblantes houppes d’acacias, des giroflées et des capucines orangées, et, ce fut, devant nos yeux, par la sveltesse jaillissante de leur port, par l’éclate¬ment fixe de leur corolle, par l’étincellement suspendu des nuances, comme si ces fleurs venaient de nous apparaître, dans un miracle des choses. Quand nous les regardons, nous aussi nous sortons des ténèbres. »

Il faut observer combien Redon varie son traitement plastique des fleurs. en haut à gauche du bouquet, le papier bleu apparaît sous la légère couche de pastel sec. Sans doute, Redon a-t-il fixé cette première couche avant de revenir avec l’ocre chaud du fond et le rose. Cette rupture de complémentaires crée d’emblée un espace. Notre regard peut aller vers le bas à gauche en restant dans le fond du dessin, tant la couche de pastel reste fine, ou au contraire aller vers le visage d’Ophélie par le haut à droite, traité à l’estompe.
Mais on observe combien le bouquet, motif principal se détache par un dessin plus net et des couleurs plus vives. Les pétales bleus entrent en contraste fort avec le fond ocre-orangé, et Redon souligne encore cet espace par un contour.

On peut voir ICI combien Redon utilise des fonds en rupture avec le motif. Ici, la feuille est sombre, ce qui met en valeur le motif presque abstrait. Dans « fantaisie », Redon semble presque abandonner tout sujet réel pour ne plus se concentrer que sur le la couleur et son traitement tour à tour sec, vaporeux, estompé.

 
 
 
 
 
Je vous propose de partir des photos suivantes prises dans le jardin de Monet à Giverny, et vous pouvez retrouver les commentaires en cliquant sur ces photos, ou sur le pastel de Elisabeth.
Picasso. " la mort de casagemas" 1901
Picasso. " la mort de casagemas" 1901
Picasso. " la mort de casagemas" 1901
Picasso. " la mort de casagemas" 1901

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